Nathan Pawlicki : “Je marchais les yeux fermés”
Lundi après-midi, un peu plus de vingt-quatre heures après la fin de son défi, Nathan Pawlicki se sentait “plutôt bien“. “Dans l’ensemble, ça va” même s’il est forcément “un peu fracassé”. “Déjà que je n’ai pas l’habitude de faire une nuit blanche, alors deux nuits blanche d’affilée, je pense que je vais prendre un peu de temps pour récupérer”, lance-t-il. Il est surtout “heureux” d’avoir achevé et réussi son pari. Celui de parcourir l’aller-retour du GR Sud, dans le sens Dumbéa – Prony – Dumbéa, en moins de 42 heures. C’était le temps qu’il s’était fixé, afin de battre le chronomètre réalisé il y a trois ans par Angélique Plaire (42 heures et 26 minutes), la première traileuse à s’être élancée sur les sentiers du Sud.
“Sommeil profond”
Dimanche, aux alentours de 10h15, il est revenu à Dumbéa après 39 heures et 7 minutes d’effort. “C’est incroyable d’arriver avec autant d’avance”, savoure-t-il. Surtout au vu de sa course. “La deuxième nuit, j’étais quand même un peu entamé. Au Camp des Kaoris, mon assistance m’a laissé repartir en me disant que j’allais retrouver un second souffle, mais franchement, j’ai eu environ 10 kilomètres, entre 150 et 160 kilomètres de course, où c’était très très costaud”, souffle-t-il, assumant avoir été “mort physiquement” à ce moment précis. Cependant, pas question d’abandonner. Dans le parc de la rivière Bleue, à même le sol, il décide de faire une sieste. “Quand je courrais, je piquais du nez, comme lorsqu’on s’endort en voiture par exemple. Il fallait vraiment que je ferme les yeux. Donc j’ai dit à Alexy Dianoux de me réveiller au bout de cinq minutes. Mais, même en cinq minutes, j’ai réussi à tomber dans un sommeil profond”, détaille-t-il. Une pause revigorante alors qu’à cet instant, il était “un peu juste sur le chrono“. “J’ai mangé un peu, j’ai bu et les sensations sont vraiment revenues après quinze minutes. Alexy m’a hyper motivé, on a réussi à courir sur un maximum de parties et, finalement, on arrive avec plus de trois heures d’avance sur Angélique”, dit-il.
Avant ce “moment difficile”, qui aura duré “peut-être trois heures”, tout s’est déroulé comme prévu, malgré une petite erreur de parcours au niveau des Muletiers, sur la première partie du tracé. “On a fait 6 kilomètres en plus, ce qui nous a fait perdre environ une heure, mais on est tout de même arrivés dans les temps au Camp des Kaoris, après environ dix heures de course”, détaille-t-il.
Nouvelles chaussures
À Netcha, après une “longue pause et un massage d’environ vingt minutes”, Nathan Pawlicki repart avec Natalia Prado. Un bref arrêt à Prony, puis à Neocallitropsis, “juste le temps de changer de chaussure car il y avait eu un passage de rivière”, et voilà le coureur de Décathlon reparti dans le sens inverse. De retour à Netcha, il s’octroie “une première sieste de dix minutes” après “130 kilomètres”. “Là, de nuit, je commençais à être fatigué. Je marchais les yeux fermés sur les parties qui n’étaient pas techniques pour pouvoir me reposer. C’était de la gestion de course avant tout, je sentais qu’il fallait que je m’économise un peu”, poursuit-il.
Jusqu’à retrouver son second souffle en fin de parcours. “Je disais que peu importent les distances, les dix derniers kilomètres sont forcément les plus compliqués, mais là, j’ai réussi à me faire mentir. Les quinze ou vingt derniers kilomètres ont peut-être été les plus simples pour moi”, assume-t-il.
“J’ai l’objectif de me lancer sur du long”
Grâce notamment à certains massages sur le parcours, Nathan Pawlicki n’a pas eu de courbature durant son défi.
Prendre son temps et augmenter petit à petit les distances ? Ce n’est pas le genre de Nathan Pawlicki. Adepte des trails courts depuis son arrivée sur le Caillou, le coureur originaire du Nord de la France a quelque peu grillé les étapes en passant de 60 à 130 kilomètres et à 210 kilomètres en seulement trois courses. “Je sens que je suis bien sur du long. Et si je réussis ce défi, je pense que je vais vouloir faire des ultratrails”, lançait-il avant son défi.
Cela s’est encore un peu plus confirmé après cet aller-retour sur le GR Sud, où il a établi une nouvelle distance record pour lui. “Les longues distances, je commence seulement à les découvrir, mais je vois qu’à chaque fois je suis bien. J’ai donc pour objectif de me lancer dans le long, en mode performance”, assume-t-il après les deux jours de course, satisfait des sensations ressenties tout au long de l’effort.
Et il a déjà des idées. “L’année prochaine, je vais être en mode plan d’entraînement pour essayer de performer sur un ultra, idéalement dans un pays autour de la Calédonie”, dit-il, évoquant notamment la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Il veut ainsi voir ce qu’il peut donner “sur un 100 kilomètres”, préparé “en mode compétiteur”, comme il l’est actuellement sur un parcours de 20 kilomètres en Calédonie.
REPÈRES
Quatre coureurs et une assistance
Nathan Pawlicki a été accompagné tout au long du parcours par des habitués des trails du Caillou afin de garder le rythme et la motivation. Jonathan Nicol a été le premier à s’élancer entre Dumbéa et Netcha (80 km), relayé ensuite par Natalia Prado entre Netcha, Prony et Netcha (50 km) et par Bruno Cantieri entre Netcha et le Camp des Kaoris (20 km). Alexy Dianoux a achevé le parcours jusqu’à Dumbéa (60 km). À chaque étape clé du parcours, que ce soit au Camp des Kaoris, à Netcha, au Neocallitropsis ou à l’embarcadère de Prony, son assistance l’attendait avec nourriture, boisson, vêtement et matelas, pour assurer le bon déroulé du défi.
Un parcours de référence
Alors que Nathan Pawlicki invite d’autres traileurs à tenter le défi, il propose de donner les différents tracés afin d’établir “un parcours de référence”. “La veille du départ, jusqu’à 19h30, je n’étais pas encore certain de quel chemin je devais prendre”, dit-il. Il y a pourtant moins que les 216 kilomètres avancés par Angélique Plaire il y a trois ans. “On a fait 209,6 km, avec une erreur de parcours de 6 kilomètres, glisse-t-il. Mais j’ai validé avec tout le monde, c’est sûr qu’on a pris le bon tracé.”
“Tellement sec”
Le retour du soleil a facilité son défi alors que le passage des Cornes du Diable aurait pu être délicat. “C’était ma seule crainte, puisqu’on peut avoir de l’eau jusqu’aux hanches. Mais là, c’était tellement sec qu’on pouvait passer sans problème. À part à Prony, je n’ai quasiment jamais mis les pieds dans l’eau”, dit-il.
Une ampoule
Nathan Pawlicki a été épargné par les blessures tout au long du parcours avec seulement une ampoule à signaler. “On l’a laissée mûrir avant de la percer et de la protéger. Mais cela ne m’a pas dérangé. J’ai été très bien conseillé et j’étais aussi super bien équipé”, glisse le coureur, sponsorisé par Décathlon.